ÉLASTOMÈRES ou CAOUTCHOUCS

ÉLASTOMÈRES ou CAOUTCHOUCS
ÉLASTOMÈRES ou CAOUTCHOUCS

Les élastomères, comme les matières plastiques, font partie de la famille des polymères. Le terme «élastomère» est utilisé aujourd’hui pour désigner d’une façon générale tous les caoutchoucs c’est-à-dire les substances macromoléculaires, naturelles ou synthétiques, possédant l’élasticité caoutchoutique.

Le terme «caoutchouc» vient du mot indien cahutchu («bois qui pleure») et rappelle ainsi l’origine du caoutchouc naturel, précurseur des élastomères d’aujourd’hui.

Le caoutchouc est, soit d’origine naturelle, provenant essentiellement de l’Hevea Brasiliensis , soit synthétique, issu de la pétrochimie.

Les élastomères sont présents dans de nombreuses applications de la vie quotidienne et occupent une place de choix dans l’industrie.

Si les pneumatiques consomment 55 p. 100 de la production des élastomères, on utilise aussi ces derniers dans un grand nombre d’autres secteurs industriels: l’automobile (à elle seule 80 p. 100 de toutes les utilisations des élastomères) sous la forme de joints, de liaisons élastiques, de tubes et de tuyaux, de membranes ou de dispositifs antivibratoires, ainsi que dans l’industrie mécanique, dans l’industrie aéronautique, dans les transports, dans l’industrie électrique, dans le bâtiment, en médecine et en pharmacie, et même dans l’industrie nucléaire. Dans ces différentes applications, les élastomères peuvent être associés à d’autres matériaux tels que les métaux, les textiles et certaines matières plastiques.

La consommation des élastomères a été de 15 millions de tonnes brutes en 1996, mais ce chiffre peut être doublé si l’on parle de consommation en pièces finies puisque les élastomères sont utilisés «formulés», c’est-à-dire renforcés, plastifiés, protégés et vulcanisés.

1. De l’objet de curiosité à la matière première de l’industrie

Le caoutchouc naturel est fourni surtout par des plantes d’origine américaine. Cortés lui-même avait été séduit par les balles rebondissantes avec lesquelles jouaient les Aztèques. Ceux-ci utilisaient en fait le latex d’un arbuste, Castilloa elastica , que les Espagnols utilisèrent pour imperméabiliser vêtements et chaussures. La première observation scientifique du caoutchouc est due à Charles de La Condamine qui, au cours de sa mission organisée par l’Académie des sciences de Paris pour mesurer la longueur d’un arc de méridien au voisinage de l’équateur (1736-1744), réunit un ensemble de notes sur le caoutchouc et ses usages, depuis Quito jusqu’au cœur de l’Amazonie. «Il croît dans la province d’Esmeraldas [sur le versant Pacifique de la Cordillère des Andes] un arbre nommé par les naturels hévé . Il en découle par la seule incision une liqueur blanche comme du lait, qui se durcit et noircit peu à peu l’air [...]. Dans la province de Quito, on enduit les toiles de cette résine et on s’en sert aux mêmes ouvrages pour lesquels nous employons la toile cirée. Le même arbre croît [...] le long des bords de la rivière des Amazones. Les Indiens Maipas nomment la résine qu’ils en tirent cahutchu [«bois qui pleure»], ce qui se prononce caoutchouc. Ils en font des bottes d’une seule pièce, qui ne prennent point l’eau et qui, lorsqu’elles sont passées par la fumée, ont tout l’air de véritable cuir. Ils en enduisent des moules de terre en forme de bouteille et, quand la résine est durcie, ils cassent le moule, en faisant sortir les morceaux par le goulot; il en reste une bouteille non fragile, légère et capable de retenir tous les liquides...» (rapport publié en 1755). Si on a là une première référence à l’Hevea Brasiliensis , il revenait à un autre Français, François Fresneau, ingénieur du roi à Cayenne, le soin de repérer et de décrire l’hévéa, de le saigner et d’étudier le latex sur place. L’intérêt pour le caoutchouc ne cesse alors de se développer, et les expériences se multiplient. La première utilisation pratique du caoutchouc en Europe, c’est la gomme à effacer (dernier quart du XVIIIe s.). Dans le même temps, le professeur Charles parvient à imperméabiliser avec du caoutchouc de la soie pour les enveloppes de ballons gonflés à l’hydrogène. Mais le latex se coagule et, lorsqu’on l’envoie en Europe, il arrive déjà durci et est peu utilisable. Il faut donc trouver un solvant pour rendre à nouveau liquide la gomme coagulée. On y parvient à peu près avec de l’éther ou de l’essence de térébenthine. Cela permet au chimiste Macquer de faire les premiers tuyaux en caoutchouc en enduisant d’une solution de latex des formes en cire.

Le caoutchouc présente encore cependant, dans les premières décennies du XIXe siècle, un inconvénient majeur: sa sensibilité thermique. Aux températures ordinaires, la gomme reste collante, et elle s’amollit fortement avec la chaleur. Par contre, le froid la rigidifie au point de lui faire perdre toute élasticité. Certes, l’Écossais Charles Mac Intosh fit breveter en Europe, en 1823, la technique déjà utilisée en Amérique pour faire des vêtements de pluie: intercaler une couche de caoutchouc entre deux épaisseurs de tissu de coton tissé serré, réduisant ainsi ces inconvénients. Mais la découverte décisive est un peu plus tardive: en 1839, l’Américain Charles Goodyear, après des années d’efforts, parvient à mettre au point la vulcanisation par addition de soufre au caoutchouc et chauffage. Presque au même moment, en Grande-Bretagne, Thomas Hancock mène des recherches importantes.

La voie est dès lors ouverte pour le développement des usages du caoutchouc. Mais c’est le succès de la bicyclette et, surtout, celui de l’automobile qui multiplièrent d’un coup ses perspectives d’utilisation. En 1888, un vétérinaire de Belfast, John Boyd Dunlop, fit breveter un système de pneumatique à valve, combinant l’élasticité d’une enveloppe de caoutchouc avec celle d’un matelas d’air. Trois ans plus tard, Michelin inventait pour la bicyclette le pneu démontable. La demande en caoutchouc allait connaître alors un formidable essor.

Or cet accroissement des besoins s’est manifesté dans une période où l’essentiel de la production reposait sur la récolte de caoutchouc sauvage ou sylvestre des hévéas de la forêt amazonienne et, accessoirement, d’autres arbres ou arbustes du Mexique (le castilloa et le guayule) ou encore diverses lianes du genre Landolphia , ou des ficus. En Amazonie, la saignée des hévéas, ou seringueiras , a donné naissance à un genre de vie particulier, celui des seringueiros : de pauvres Blancs qui recevaient des concessions dont ils exploitaient les arbres dispersés dans la masse de la forêt. L’Hevea Brasiliensis à l’état naturel est un grand arbre de 20 à 30 mètres de hauteur, avec au sommet un feuillage étalé d’un vert intense. Le seringueiro l’incisait, le plus haut possible sur le tronc, et recueillait le latex dans de petits godets pendant les cinq mois de la saison relativement sèche durant laquelle se faisait la cueillette. Le contenu des godets était ensuite rassemblé et porté au defumador , où le caoutchouc brut était enfumé et conditionné en boules de poids variable – de 2 à 50 kilos – et de qualité hétérogène. Un seringueiro parvenait à collecter au moins 400 kilos par campagne, avec une production minimale de 5 kilos de «Para fin», la meilleure qualité, par arbre saigné. Malgré les hauts prix atteints par le latex (jusqu’à 7,05 dollars le kilo en 1910), le seringueiro était en général misérable, car ce furent les intermédiaires et les commerçants des villes qui tirèrent du caoutchouc d’étonnantes fortunes qui firent la splendeur d’une ville comme Manaus, célèbre par son extraordinaire théâtre.

Il était cependant devenu évident depuis longtemps que la cueillette était insuffisante pour couvrir les besoins futurs et, malgré les efforts des Brésiliens pour conserver leurs monopole, l’Anglais Wickam, en 1876, fit sortir clandestinement 70 000 graines d’hévéa, dont moins de 3 000 germèrent en Angleterre avant que les jeunes plants ne soient envoyés à Ceylan. Ce fut le point de départ de toutes les plantations d’hévéas d’Asie du Sud-Est. À l’extrême fin du XIXe siècle, les véritables plantations se multiplièrent et, en 1910 encore, le Brésil fournissait la moitié des 80 000 tonnes de la production mondiale. Dès 1914, cependant, le caoutchouc de plantation l’emportait sur le caoutchouc sylvestre.

Dans le même temps, les chimistes avaient réalisé des progrès décisifs dans la compréhension de la constitution même du caoutchouc. Dès 1826, Faraday avait montré que le caoutchouc naturel était principalement un hydrocarbure comportant plusieurs fois 5 atomes de carbone pour 8 d’hydrogène. c’est un Allemand, F. Hofmann, qui prit en 1909 le premier brevet relatif à un véritable caoutchouc synthétique, et les travaux s’accélérèrent pendant la Première Guerre mondiale du fait du blocus allié qui coupait les puissances germaniques de leurs fournisseurs de caoutchouc naturel. Malgré les fluctuations du prix du caoutchouc naturel, tombé à 7,7 cents le kilo en 1932, on poursuivit, en Allemagne comme en U.R.S.S. par volonté d’autarcie, les recherches sur le caoutchouc synthétique et la mise en place d’une industrie nationale. La Seconde Guerre mondiale conduisit les Américains, privés de leurs fournisseurs de caoutchouc naturel occupés par les Japonais, à faire de même avec une puissance inégalée. Désormais, le caoutchouc synthétique, dont la production fut stimulée par la guerre de Corée (1951) comme par la crise de Suez (1956), ne va plus cesser de se développer tant quantitativement que qualitativement.

2. Caractéristiques fondamentales des élastomères

Bien que faisant partie d’une seule et même grande famille, celle des polymères, les élastomères ont un comportement très particulier et très différent des matières plastiques, ou plastomères.

Pour qu’un matériau soit mécaniquement reconnu comme un caoutchouc, il doit être:

– souple, c’est-à-dire de faible rigidité (quelques mégapascals);

– hautement déformable, c’est-à-dire capable de supporter de très grandes déformations sans se rompre ou d’atteindre des allongements «rupture» de plus de 100 p. 100, tout en possédant, à son allongement maximal, une résistance à la rupture relativement élevée;

– élastique ou résilient, c’est-à-dire capable de retrouver sa géométrie initiale, après cessation d’une sollicitation, tout en restituant quantitativement au milieu l’énergie qui lui a été fournie pour le déformer.

Aspect moléculaire

Pour répondre à ces caractéristiques mécaniques, un élastomère est constitué de longues chaînes moléculaires, appelées macromolécules [cf. MACROMOLÉCULES], qui sont repliées sur elles-mêmes au repos: c’est la pelote statistique. Les interactions entre chaînes sont faibles (faible cohésion) et sous l’action d’une contrainte externe, les chaînes possèdent de très nombreuses possibilités conformationnelles (par rotation autour des liaisons carbone-carbone) dans le domaine des températures d’utilisation. Ces chaînes macromoléculaires repliées sur elles-mêmes s’enchevêtrent avec leurs voisines et conduisent à un matériau élastique sous l’effet d’une faible contrainte. Lorsque l’on applique une plus forte contrainte, les chaînes vont se déployer, glisser et finir par se désolidariser les unes des autres. C’est pourquoi la réalisation de liaisons chimiques entre les chaînes, pour former un réseau tridimensionnel stable, a été la découverte primordiale pour l’utilisation des élastomères.

Cette formation de liaisons chimiques (généralement covalentes), appelées encore ponts de réticulation, est le résultat de la vulcanisation des caoutchoucs (terme faisant allusion à Vulcain, dieu romain du feu et des volcans). Cette réaction impose la présence de sites actifs sur les chaînes macromoléculaires (doubles liaisons, hydrogène ou halogène labile, etc.).

La pelote statistique permet d’expliquer l’aspect thermodynamique de l’élasticité caoutchoutique. Trois phénomènes peuvent être constatés:

– une bande de caoutchouc soumise à une déformation en traction s’allonge de plusieurs fois sa longueur au repos; il y a déploiement des chaînes macromoléculaires qui, si on relâche la tension, reviennent à leur état initial pelotonnées;

– quand on étire une bande de caoutchouc, on passe par un état plus ordonné de la matière, moins stable thermodynamiquement, et la bande s’échauffe;

– en chauffant une bande de caoutchouc sous tension, elle se rétracte, on a alors augmentation de l’entropie (retour à l’état désordonné de la matière dû aux mouvements microbrowniens des segments moléculaires).

Température de transition vitreuse

La température de transition vitreuse (Tv) d’un polymère dépend de nombreux facteurs (doubles liaisons, polarité des chaînes, microstructure, etc.) [cf. POLYMÈRES]. C’est elle qui définit le comportement d’un élastomère par rapport à un plastomère (non cristallin).

En règle générale:

– si Tv est supérieure à la température ambiante, on a affaire à un plastomère;

– si Tv est inférieure à la température ambiante, on a affaire à un élastomère.

L’analyse des spectres thermomécaniques d’un plastomère (polystyrène) et d’un élastomère, (caoutchouc naturel) montre les domaines d’utilisation et de mise en forme (mise en œuvre) de ces matériaux. En effet, le polystyrène sera utilisé dans son domaine vitreux (jusqu’à 70 0C) et mis en œuvre au-delà de sa Tv (plus de 100 0C), où il sera alors à l’état fondu, alors que le caoutchouc naturel, dont la Tv est très basse (environ– 70 0C), sera à la fois utilisé et mis en œuvre bien au-dessus de sa Tv (soit de — 45 à + 100 0C).

On peut donc définir qu’un élastomère, ou caoutchouc, est un polymère amorphe (ou semi-cristallin) de basse Tv et de masse moléculaire moyenne élevée, souvent supérieure à 100 000, dont les températures d’utilisation, après vulcanisation, correspondent aux températures de mise en œuvre.

Nécessité de formuler

Contrairement à un plastomère, un élastomère brut, même vulcanisé, ne possède pas de propriétés suffisantes pour des utilisations industrielles (exceptions faites pour le caoutchouc naturel et le polychloroprène semi-cristallins, qui peuvent être utilisés à l’état brut ou pure gomme, c’est-à-dire sans être renforcés, dans la fabrication des gants de chirurgie et d’adhésifs, par exemple).

Ces faibles propriétés à l’état brut ainsi que l’obligation de vulcaniser nécessitent l’incorporation aux élastomères d’un certain nombre d’additifs ayant tous un rôle bien défini. C’est ce que l’on appelle la formulation . Celle-ci, malgré un certain empirisme, relève de beaucoup de savoir-faire pour maîtriser au mieux l’ajustement de certaines propriétés, parfois antagonistes, que réclament certaines applications.

Une formulation type contient:

Le ou les élastomères . Leurs propriétés spécifiques, et en particulier leurs propriétés chimiques, devront correspondre aux nécessités de l’application. Un mélange d’élastomères pourra être utilisé si nécessaire.

La ou les charges . Utilisées surtout pour donner des propriétés aux caoutchoucs, elles peuvent aussi améliorer la mise en œuvre et diminuer le prix de revient du mélange. Les charges les plus utilisées sont les noirs de carbone, les silices de précipitation, les craies et les kaolins.

Les plastifiants . Ils sont utilisés pour faciliter la mise en œuvre ou abaisser la Tv (amélioration de la tenue à basse température). Ce sont, en général, des huiles de pétrole ou des esters.

Les agents de protection . Ils sont destinés à protéger l’élastomère, dont les chaînes macromoléculaires sont plus ou moins sensibles, contre l’oxygène et l’ozone principalement. Ces produits sont généralement des dérivés aminés ou phénoliques.

Un système de vulcanisation . Il permet la formation d’un réseau tridimensionnel stable sans lequel l’utilisation d’un élastomère serait impossible.

Les ingrédients divers . On utilise de nombreux produits au rôle très spécifique tels que des agents gonflants pour la fabrication de caoutchoucs cellulaires; des ignifugeants permettant d’obtenir les normes de tenue au feu exigées dans le bâtiment et les transports; des colorants; des agents de mise en œuvre, etc.

L’ensemble de tous ces composés forme un mélange .

Notion de renforcement

La notion de renforcement par une charge est très spécifique des élastomères. En effet, comme il a été dit précédemment, ceux-ci ont des propriétés de rupture à la température ambiante quasi nulles.

Par addition de quantités croissantes de noir de carbone (jusqu’à 50 parties de noir pour 100 parties d’élastomère), la résistance à la rupture croît, bien que la quantité d’élastomère déformable dans l’échantillon diminue.

De la même façon, l’introduction de noir à particules de plus en plus fines (diamètre moyen de 500 à 20 nm) améliore les propriétés de rupture.

On conçoit alors l’importance de cette charge qui permet d’obtenir des courbes de traction-allongement variables et adaptables aux propriétés requises par les spécifications.

En ce qui concerne les autres charges, on peut dire que les silices de précipitation concurrencent les noirs de carbone avec, en plus, la possibilité de réaliser des pièces de couleur. Les kaolins semi-renforçants permettent l’obtention de mélanges clairs à bas prix; il en est de même pour les craies, qui sont plutôt considérées comme charges diluantes.

La vulcanisation

La vulcanisation par le soufre est encore le procédé le plus utilisé bien que le plus ancien, car c’est un procédé très souple qui permet l’obtention d’une large plage de propriétés pour un mélange donné.

Un système de vulcanisation par le soufre comprend un agent de réticulation (le soufre ou des produits libérant du soufre), des activateurs (oxyde de zinc et acide stéarique) et des accélérateurs (thiazoles, sulfénamides, thiurames...) permettant essentiellement de raccourcir les temps de vulcanisation pour les adapter aux impératifs industriels.

La vulcanisation par le soufre impose la présence de doubles liaisons sur les chaînes macromoléculaires de l’élastomère et consiste à créer une liaison pontale (poly- ou monosulfure) tous les soixante à cent maillons de la chaîne environ. Les doses de soufre sont de ce fait très faibles (0,3 à 2 parties pour 100 parties d’élastomère).

Le nombre de liaisons pontales a une très grande influence sur les propriétés des élastomères.

Un des inconvénients de la vulcanisation par le soufre provient du fait que les liaisons pontales formées sont relativement sensibles à la température et conduisent à des vulcanisats aux propriétés de vieillissement parfois problématiques. Toutefois, par le biais de l’ajustement du taux de soufre, on arrive à optimiser la résistance thermique du réseau. Cette résistance est fondée essentiellement sur la nature des ponts formés: les liaisons polysulfures ayant des énergies de dissociation (205 kJ/mol) plus faibles que les monosulfures (268 kJ/mol).

En dehors du soufre, la vulcanisation peut s’effectuer par voie radicalaire, à l’aide de peroxydes organiques. Ces derniers permettent d’augmenter très significativement les propriétés thermiques des réseaux grâce à la création de liaisons pontales carbone-carbone plus solides (énergies de dissociation de l’ordre de 352 kJ/mol). Cependant les propriétés mécaniques, et surtout dynamiques, obtenues avec ce procédé sont en général médiocres.

D’autres types d’agents de vulcanisation sont utilisés, en particulier pour des élastomères comportant des sites actifs spécifiques (carboxyles, halogènes, etc.).

3. Les différentes familles d’élastomères

On compte une quinzaine de familles d’élastomères et dans certaines de ces familles dix à vingt grades différents. C’est dire que les méthodes actuelles de polymérisation permettent, de plus en plus, la fabrication de produits sur mesure répondant à la fois aux problèmes de mise en œuvre et aux propriétés recherchées.

La classification courante consiste à séparer les caoutchoucs en trois catégories (les sigles utilisés sont ceux qui sont recommandés par la norme ISO 1 629 de 1995):

les caoutchoucs à usages généraux , qui sont représentés par le caoutchouc naturel (NR) et le polyisoprène de synthèse (IR), les copolymères de butadiène styrène (SBR) et les polybutadiènes (BR);

les caoutchoucs spéciaux , qui sont les co- ou terpolymères d’éthylène propylène et diène (EPM et EPDM), les copolymères d’isobutylène isoprène, chlorés ou bromés (IIR, BIIR, CIIR), les copolymères de butadiène acrylonitrile (NBR), et les polychloroprènes (CR);

les caoutchoucs très spéciaux , qui rassemblent les caoutchoucs de silicone (VMQ), les élastomères fluorés (FPM), les polyéthylènes chlorés et chlorosulfonés (CM, CSM), les polyacrylates (ACM), les copolymères éthylène acétate de vinyle (EVA) et l’éthylène acrylate de méthyle (EAM), les caoutchoucs nitrile hydrogénés (HNBR) et les caoutchoucs d’épichlorhydrines (CO, ECO, GECO).

On peut ajouter à cette classification les élastomères thermoplastiques qui forment une catégorie à part. En effet, par rapport aux caoutchoucs précédemment cités, ces élastomères n’ont pas besoin d’être vulcanisés et se mettent en œuvre comme les thermoplastiques. Ils seront traités dans le chapitre 5.

Les deux premières familles de caoutchouc représentent 97 p. 100 de la consommation mondiale. La troisième famille regroupe les élastomères à hautes performances thermiques et/ou chimiques indispensables et sont en plein développement sur le marché.

La grande majorité des élastomères est synthétisée à partir de monomères issus des dérivés pétroliers et par polymérisation, soit radicalaire en émulsion, soit ionique (anionique, cationique, Ziegler-Natta ou complexes de métaux de transition) en solution [cf. MACROMOLÉCULES].

Parmi les procédés les plus récents, on peut citer la polymérisation des caoutchoucs d’éthylène et de propylène par les métallocènes.

Les caoutchoucs à usages généraux

Cette catégorie comprend les caoutchoucs de grande consommation, utilisés principalement dans l’industrie du pneumatique.

Le caoutchouc naturel ou polyisoprène représente 39 p. 100 de la consommation mondiale. Il est tiré actuellement exclusivement d’un arbre, l’Hevea Brasiliensis. À l’état solide, il provient de la coagulation et du séchage d’un produit tiré de son écorce: le latex.

Le latex (mot latin signifiant liqueur) est recueilli, par saignée de l’écorce de l’arbre, de une à trois fois par semaine, toute l’année, et pendant environ trente ans. Il contient un grand nombre de petites particules en suspension dans un milieu liquide. Cette phase dispersée contient 94 p. 100 au moins de polyisoprène.

La biosynthèse de cet élastomère est maintenant bien connue; la matière première du caoutchouc est le saccharose produit par l’activité photosynthétique des feuilles de l’hévéa. La production moyenne de caoutchouc par arbre et par an est de 5 kilogrammes (soit 2 tonnes à l’hectare planté).

Le latex est utilisé soit sous forme liquide, pour des applications telles que les gants ou les préservatifs, soit coagulé par addition d’acide dilué et séparé de son milieu liquide. Il est ensuite laminé et/ou broyé en grains. Les feuilles ou les grains ainsi obtenus sont lavés et séchés dans des fours puis compactés en balles.

La fabrication par broyage conduit à des caoutchoucs dits «techniquement spécifiés», répondant donc à des critères normalisés de pureté, de viscosité, d’aptitude au vieillissement, etc.

La nature a conçu un polymère de très grande pureté structurale (99 p. 100 de polyisoprène Cis 1-4, avec une masse moléculaire moyenne et un indice de polydispersité élevés. Cette grande régularité de structure, associée à de hauts poids moléculaires, entraîne une organisation des chaînes macromoléculaires les unes par rapport aux autres et, lors d’une extension, une tendance à la cristallisation et à un auto-renforcement du matériau (augmentation de la résistance mécanique). C’est un des rares élastomères à posséder une excellente résistance à la rupture (de l’ordre de 30 MPa) sans présence de charges renforçantes.

Sa température de transition vitreuse est basse (Tv = — 70 à — 75 0C), ce qui lui confère une bonne tenue à basse température. Il a toutefois tendance à se rigidifier au froid (cristallisation).

Parmi les caractéristiques les plus intéressantes du caoutchouc naturel on peut citer:

– sa résistance et son collant à cru (état non vulcanisé). Ces deux propriétés font de cet élastomère un matériau irremplaçable dans le domaine de la confection du pneumatique;

– sa grande élasticité. Il ne s’échauffera pas ou guère lors d’une sollicitation en dynamique et sera de ce fait utilisé pour la réalisation de composites (supports moteurs, appuis de ponts, carcasses de pneumatique, etc.) associé à du métal ou du textile;

– sa résistance à la déchirure et à la propagation d’entailles. Cette propriété est appréciée, par exemple, dans les flancs de pneumatique.

Ses limites se situent malheureusement au niveau du vieillissement (sous l’effet de la chaleur et de l’ozone) car sa double liaison (une par maillon isoprène), activée par le groupe CH3, est particulièrement oxydable. Cependant, par le biais du choix du système de vulcanisation et du système de protection, il est possible de pallier partiellement ce défaut.

Une autre de ses faiblesses est la mauvaise résistance aux huiles et aux solvants hydrocarbonés avec lesquels l’élastomère peut se trouver en contact dans de nombreuses applications.

Les utilisations du caoutchouc naturel sont nombreuses; en dehors des pneumatiques (surtout dans le domaine des poids lourds et de l’aviation), on peut citer les pièces à applications dynamiques (supports moteur, appuis de pont et antisismiques), les bandes transporteuses, les gants de ménage et de chirurgie, les préservatifs, etc.

Le styrène butadiène (SBR) représente 35 p. 100 de la consommation mondiale, et sa première utilisation est le pneumatique de tourisme. Apparu au moment de la Seconde Guerre mondiale, d’abord en Allemagne, puis aux États-Unis, cet élastomère a remplacé le caoutchouc naturel dans cette application. Il est fabriqué par voie radicalaire en émulsion, à 50 ou 5 0C, ou par voie anionique en solution. Par ce dernier procédé, les polymères obtenus peuvent être mieux contrôlés sur le plan de leur microstructure (teneur en vinyle et en trans-1-4), ce qui permet d’optimiser certaines performances du pneumatique. Les élastomères obtenus en émulsion à froid restent cependant les plus utilisés.

Les SBR n’ont de propriétés correctes qu’en présence de noir de carbone fin. Une fois renforcés, ces élastomères possèdent des caractéristiques mécaniques proches de celles du caoutchouc naturel sans toutefois l’égaler. Leur propriété spécifique est d’avoir une bonne résistance à la fatigue par flexion et à l’usure.

Le polyisoprène de synthèse (IR) , bien que très voisin du caoutchouc naturel sur le plan de la microstructure et des propriétés, ne peut remplacer ce dernier en raison de son prix nettement plus élevé.

Les polybutadiènes (BR) représentent 11 p. 100 de la consommation mondiale. Ils sont fabriqués en solution avec des catalyseurs de Ziegler-Natta et ont une configuration stérique très régulière (97 à 98 p. 100 de structure Cis-1-4). Du fait de leur caractère totalement apolaire, leur Tv est la plus basse de tous les caoutchoucs (avec les silicones); elle se situe entre — 85 et — 105 0C. Ces élastomères ont des caractéristiques remarquables telles qu’un très faible échauffement sous sollicitation dynamique et une excellente résistance à l’abrasion et aux basses températures.

Ils n’ont cependant pas d’aussi bonnes propriétés mécaniques que les élastomères précédents, même en présence de charges renforçantes.

Additionnés à des taux de 20 à 25 p. 100 au SBR ou au caoutchouc naturel, ils améliorent la qualité des pneumatiques, des bandes transporteuses, etc.

Avant de clore ce chapitre sur les caoutchoucs à usages généraux, il faut rappeler que, malgré leur très forte utilisation, ces caoutchoucs sont très sensibles au vieillissement, qu’ils ne peuvent être utilisés au-dessus d’une température de l’ordre de 70 à 90 0C et qu’ils ne résistent pas aux huiles et aux solvants hydrocarbonés. Les formulations devront être optimisées pour pallier au maximum leur sensibilité au vieillissement.

Les caoutchoucs spéciaux

Dans la famille des caoutchoucs à «usages spéciaux» les terpolymères d’éthylène, propylène et diène (EPDM) sont les plus récents et leur part sur le marché ne cesse d’augmenter. Ils représentent 6 p. 100 du tonnage mondial. Ils sont fabriqués en solution, par catalyse Ziegler-Natta. La polymérisation donne lieu à différents types de caoutchouc, variant par de nombreux paramètres tels que le rapport éthylène/propylène, le taux de diène, le type de diène... Cela conduit à des propriétés mécaniques et de mise en œuvre très variées.

Le procédé récent de polymérisation par les métallocènes en mode condensé, appliqué à ces polymères, permet l’élaboration d’élastomères dont la pureté structurale est encore mieux contrôlée.

Leurs propriétés essentielles résident dans leur bonne résistance au vieillissement vis-à-vis de l’ozone (car très saturés) et de la chaleur (surtout s’ils sont vulcanisés avec des peroxydes car ils peuvent alors atteindre des températures en service continu de 150 0C au moins). De plus, ils acceptent des taux de charge et de plastifiant importants, ce qui diminue le prix de revient des mélanges.

On les utilise principalement dans l’automobile (joints de vitrage, durits, joints de frein, etc.), dans le bâtiment, dans l’électroménager (joints de hublot de machine à laver), en câblerie et dans la modification des plastiques (résistance aux chocs du polypropylène, etc.). C’est le caoutchouc le plus utilisé dans les pièces industrielles en France.

Le copolymère isobutylène isoprène (IIR) , couramment appelé caoutchouc butyl , est un des rares élastomères polymérisés par voie cationique. Ce polymère contient 98 p. 100 de polyisobutylène et seulement 2 p. 100 d’isoprène. Ce dernier élément apporte ainsi quelques doubles liaisons nécessaires pour vulcaniser l’élastomère par le soufre. Du fait de cette faible insaturation, le caoutchouc butyl est résistant au vieillissement oxydant et à l’ozone. Son remarquable développement est surtout dû à sa grande imperméabilité aux gaz, d’où son emploi dans les chambres à air ou pour le garnissage interne des pneus sans chambre. Pour cette dernière utilisation, l’élastomère butyl sera bromé ou chloré pour favoriser l’adhérence du garnissage à la carcasse du pneumatique.

Les caoutchoucs butyl ont une bonne inertie chimique vis-à-vis des solvants polaires, des acides et des bases. Ils trouvent aussi des applications dans le domaine médical (bouchons pharmaceutiques), dans les revêtements internes de camions ou de wagons-citernes (transport de fluides divers), etc. Ils représentent 5 p. 100 de la consommation mondiale.

Les copolymères butadiène acrylonitrile (NBR) , couramment appelés caoutchoucs nitrile , sont fabriqués, comme les SBR, en émulsion par voie radicalaire à chaud ou à froid. Ils se caractérisent essentiellement par leur résistance aux solvants, en particulier aux hydrocarbures aliphatiques ou partiellement aromatiques, si le taux d’acrylonitrile dans le copolymère est élevé; c’est pour cela que les taux proposés par les producteurs varient de 17 à 50 p. 100. De ce fait, ce sont des polymères utilisés pour les pièces d’automobiles qui entrent en contact avec les carburants. Mais, limités par leur tenue en température et leur mauvaise résistance à l’ozone, ils ont tendance à être remplacés dans cette application par des polymères plus performants comme les polyépichlorhydrines ou les élastomères fluorés.

Les caoutchoucs nitrile représentent à peu près 2 p. 100 du tonnage mondial et sont utilisés dans l’industrie automobile (tuyaux et joints pour carburants), dans l’industrie du pétrole, dans l’imprimerie (revêtements de cylindres), dans la chaussure (semelles résistantes aux huiles), dans l’industrie des joints en général.

Les polychloroprènes (CR) sont fabriqués en émulsion par voie radicalaire, à partir du monomère chloroprène. Ce monomère est très voisin de l’isoprène et s’en différencie essentiellement par son atome de chlore qui remplace le groupe méthyle de l’isoprène. Apparu dans les années 1930, il était destiné à concurrencer le caoutchouc naturel en palliant ses défauts (mauvaise résistance au vieillissement, à la chaleur, à l’ozone et aux huiles).

De ce fait son utilisation a été très importante, en particulier dans l’automobile. Aujourd’hui, du fait de sa tenue thermique insuffisante, il est de moins en moins utilisé dans ce domaine et ne représente plus que 2 p. 100 de la consommation mondiale. Ses utilisations sont les courroies, les tuyaux hydrauliques, les câbles (grâce à son autoextinguibilité), les revêtements de cylindres, etc.

Caoutchoucs très spéciaux

Les polysiloxanes ou caoutchoucs de silicone sont les caoutchoucs très spéciaux dont le tonnage est le plus important. Ce ne sont plus des caoutchoucs à squelette carboné mais des caoutchoucs à base de silicium-oxygène. Leur qualité la plus remarquable est leur domaine d’utilisation en température, qui s’étend de — 85 à + 250 0C, avec une quasi-constance de leurs propriétés dans ce domaine. En revanche, leurs propriétés mécaniques sont relativement faibles. Ils entrent dans de nombreuses applications de secteurs tels que l’industrie électrique et électronique, ou l’industrie automobile. Ils se caractérisent aussi par une grande inertie physiologique, ce qui permet de les utiliser dans le domaine médical (prothèses). Ils ont une résistance médiocre aux huiles hydrocarbonées sauf pour les élastomères silicones fluorés, très chers, mais très appréciés dans l’aéronautique (alliant tenue au froid, à la chaleur et au kérosène).

Les fluorocarbonés constituent une autre famille d’élastomères très performants. Ils sont composés de 65 à 72 p. 100 de fluor, ce qui leur confère une très grande inertie chimique et thermique. Ils peuvent ainsi être utilisés jusqu’à des températures de l’ordre de + 250 0C. Leur résistance au froid est toutefois inférieure à celle des silicones (\ÉLASTOMÈRES ou CAOUTCHOUCS — 30 0C). Malgré leur prix élevé, ils ont pénétré le marché automobile, en particulier dans les tuyaux pour carburants (imperméabilité aux vapeurs d’essence) et dans les bagues d’étanchéité.

Les polyacrylates ont été conçus tout spécialement pour résister aux huiles de boîtes de vitesses automatiques contenant des additifs à base de soufre. Ils sont performants à la fois dans les huiles et à la chaleur (180 0C).

Les polyéthylènes chlorés et chlorosulfonés sont des concurrents des polychloroprènes car de formule chimique très voisine. Leur caractère saturé leur confère une meilleure résistance à la chaleur (120 à 130 0C). Ils sont très utilisés en câblerie.

Le nitrile hydrogéné , un des plus récents sur le marché, pallie les défauts du caoutchouc nitrile traditionnel, à savoir la faible résistance thermique (90 0C) et la sensibilité à l’ozone. Ce polymère, dont on a hydrogéné les doubles liaisons, a une tenue thermique supérieure à 150 0C, avec une excellente résistance aux huiles et à l’ozone. Ses débouchés sont l’automobile (courroies, joints de pompe à eau) et l’industrie pétrolière.

4. Mise en œuvre des élastomères

Avant d’être transformés en objets finis, les élastomères doivent être généralement formulés. La nécessité de la formulation impose la fabrication d’un «mélange». Le «mélangeage» (malaxage) consiste à incorporer et à disperser dans un élastomère, selon un ordre déterminé et dans des conditions de vitesses de cisaillement et de températures définies, les différents ingrédients de la formulation préalablement établie pour une application.

Cette opération s’effectue soit à l’aide de mélangeurs à «cylindres ouverts», soit à l’aide de mélangeurs dits «internes», à rotors sécants ou tangents. La conduite de cette opération est de plus en plus automatisée pour les mélangeurs internes par un contrôle approprié des temps d’incorporation, de la température et de l’énergie absorbée.

En fin de malaxage, le mélange est mis en feuilles ou en bandes de six à dix millimètres d’épaisseur, refroidi et stocké avant la mise en forme.

Mise en forme des mélanges

Elle consiste à donner au mélange la forme de la pièce à réaliser et à vulcaniser, soit simultanément, soit lors d’une seconde opération.

La mise en forme peut se faire:

Par moulage à l’aide de presses (injection, compression ou transfert). Dans ce cas, la vulcanisation se fait en même temps que la mise en forme dans le moule.

Par extrusion , pour la réalisation de profilés. Dans ce procédé, la mise en forme se fait dans une extrudeuse; la vulcanisation a lieu dans un second temps et peut se faire par différentes techniques (ultra haute fréquence [UHF], bains de sels, lits fluides, autoclave, etc.).

Par calandrage , pour la réalisation de feuilles fines ou de tissus enduits (textile-caoutchouc) largement utilisés pour les pneumatiques (carcasses, ceintures, etc.). La mise en forme s’effectue à l’aide de calandres (machines à deux, trois ou quatre cylindres). La vulcanisation des feuilles obtenues se fera en discontinu dans un autoclave ou en continu à l’aide d’une rotocure.

Les pièces réalisées par l’une ou l’autre de ces techniques passent dans des ateliers de finition et de contrôle plus ou moins rigoureux. En particulier, le contrôle à l’unité est pratiqué pour des pièces de grande précision (pour l’aéronautique par exemple).

5. Les caoutchoucs ou élastomères thermoplastiques

Les élastomères thermoplastiques (TPE), en plein développement, possèdent un certain nombre d’avantages par rapport aux élastomères classiques, et les remplacent dans certaines applications. On peut définir les élastomères thermoplastiques comme des matériaux qui allient les propriétés de souplesse des caoutchoucs à la mise en œuvre thermoréversible des thermoplastiques.

Tout d’abord, la plupart d’entre eux ne nécessitent pas ou peu de formulation. Si une formulation est nécessaire, elle est effectuée soit par le producteur soit par un intermédiaire entre le producteur et le transformateur. Cet intermédiaire s’appelle un «compoundeur».

Leur mise en œuvre est très simplifiée, elle demande moins d’étapes que celle des caoutchoucs (pas de mélangeage, pas de vulcanisation) et conduit donc à une réduction des coûts. Les temps de mise en œuvre sont aussi beaucoup plus courts (réduction de l’énergie consommée) et les méthodes de mise en œuvre sont plus nombreuses puisque ce sont les mêmes que celles qui sont utilisées pour les plastomères. Certaines de ces méthodes, comme le thermoformage ou le rotomoulage, ne sont pas utilisables pour les caoutchoucs classiques.

Contrairement aux caoutchoucs classiques, les élastomères thermoplastiques, qui ne sont pas vulcanisés, sont recyclables. On peut donc réutiliser les chutes et les déchets de fabrication sans diminution ou presque de leurs propriétés.

Ces nombreux avantages ne doivent cependant pas faire oublier que la plupart de ces élastomères ont une sensibilité thermique importante, à partir du moment où l’on associe chaleur et déformation (tendance au fluage).

On peut différencier deux grandes familles d’élastomères thermoplastiques: celle qui est obtenue par voie de synthèse (polymères à blocs) et celle qui est obtenue par mélange physique d’un thermoplastique avec un caoutchouc, cette phase caoutchouc pouvant être réticulée (vulcanisée) ou non.

Les polymères à blocs les plus importants sont les styrène butadiène styrène (SBS), les styrène isoprène styrène (SIS), les styrène éthylènebutène styrène (SEBS), les polyuréthanes thermoplastiques (TPU), les copolyesters thermoplastiques (COPE) et les copolyéther amide (CPA).

Les mélanges physiques sont représentés par les thermoplastiques oléfiniques (TPO) et les thermoplastiques oléfiniques à phase caoutchouc réticulée (TPV).

En 1995, le marché mondial des élastomères thermoplastiques s’élevait à 909 000 tonnes (selon Rapra Technology Ltd.), dont 329 000 en Europe.

En Europe, ils sont principalement utilisés dans le domaine automobile (30 p. 100), où ils ont remplacé certains caoutchoucs classiques (soufflets de cardan, durit air chaud, etc.), la chaussure (13 p. 100), la modification des bitumes d’étanchéité ou routier (12 p. 100), la modification des plastiques pour la résistance aux chocs (11 p. 100) et les adhésifs (10 p. 100).

Le reste entrerait dans des secteurs tels que les pièces mécaniques, la câblerie, le bâtiment, le domaine médical, etc.

6. Aspects économiques de l’industrie des élastomères

Sur une production annuelle de quinze millions de tonnes de caoutchouc, 60 p. 100 représentent les caoutchoucs de synthèse et 40 p. 100 le caoutchouc naturel. Les principaux pays producteurs de caoutchoucs de synthèse sont les États-Unis, suivis par l’Union européenne et le Japon. Au sein de l’Union européenne, la France est le premier producteur de caoutchouc de synthèse. Depuis quelques années, la consommation égale à peu près la production et elle serait en progression de 3 à 4 p. 100 depuis 1995.

En ce qui concerne le caoutchouc naturel, la Thaïlande, l’Indonésie et la Malaisie produisent à eux trois 4,3 Mt sur les 5,9 Mt que représente la production mondiale. Les pays d’Afrique produisent moins de 300 000 tonnes. Plus des trois quarts du caoutchouc naturel produit est d’origine villageoise, c’est-à-dire qu’il provient de petites exploitations inférieures à cinq hectares.

Le principal problème que devrait rencontrer le caoutchouc naturel dans les années à venir est essentiellement d’ordre économique. Avec l’industrialisation des pays en développement, on s’attend à une pénurie du caoutchouc naturel et, de plus, dans certains pays grands producteurs, comme la Malaisie ou la Thaïlande, des phénomènes socio-économiques contribuent à freiner la production.

L’industrie de transformation du caoutchouc est divisée en deux grands secteurs: le pneumatique (70 p. 100 de la production en France) et le caoutchouc industriel , c’est-à-dire toutes les pièces en caoutchouc hors pneumatique (30 p. 100 de la production en France).

Dans le secteur du pneumatique en 1995, Michelin (France) occupe le deuxième rang mondial (en chiffre d’affaires) derrière Bridgestone (Japon) et devant Goodyear (États-Unis).

Dans le secteur du caoutchouc industriel, toujours en chiffre d’affaires, Hutchinson (France) est au quatrième rang mondial après Bridgestone (Japon), B.T.R. (Grande-Bretagne) et Freudenberg (Allemagne).

L’industrie Française de transformation du caoutchouc a produit un peu plus de un million de tonnes (pièces finies) en 1995, avec un chiffre d’affaires de trente-neuf milliards de francs. Les exportations ont très nettement dépassé les importations.

Les usines de transformation se situent un peu partout en France, mais principalement dans le Nord, la région Rhône-Alpes, l’Ouest et le Centre.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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